LETTRE OUVERTE AUX MEMBRES DE LA FEDERATION FRANCAISE DE WUSHU

et plus si affinités ...

Bonjour à tou/te/s,

0-PREAMBULE

Pour situer mon niveau d'intervention, je suis encadrant et responsable de l'activité Kungfu, dans la section "arts martiaux chinois" (recouvrant actuellement le Taijiquan yang armes et mains nues, un Gongfu traditionnel généraliste armes et mains nues, du Jiequandao, du Sanda initiation, du Qigong et même du Shuaijiao fut un temps ...), de l'association sportive d'une université parisienne. Je suis titulaire du CM (et donc ATT1), non gradé (car à l'instar de Laplace, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse). Je pratique officiellement et sérieusement depuis 2003 bien que mon intérêt "martial" remonte aux années 80. Je n'ai jamais participé à une compétition sportive en arts martiaux, mais j'ai été compétiteur de haut-niveau en Volley-ball dans les années 90. J'ai par contre participé à, voire (co)organisé, plusieurs événements de type "démonstrations" ou "initiations" d'arts martiaux et sports de combat (en moyenne 1 à 2 par an depuis 2003).

Je souhaite réagir et participer à cet espèce de débat qui a lieu actuellement dans notre communauté du Wushu français autour des difficultés rencontrées par l'actuelle fédération délégataire. Même si je ne suis pas parvenu à achever ce courrier avant l'e-AG fédérale du 7 juin, je pense qu'il n'est jamais trop tard pour s'exprimer. (Vos réponses sont bienvenues, tout en bas de cette page !)

Pour ceux qui ont raté des épisodes, voici ma vision officieuse et personnelle de l'histoire fédérale. Ces difficultés ont cours depuis la création de notre fédération autour de 2005, par transformation de l'ancienne fédération de Taichi et Chikung (FTCCG) en une fédération de tous les arts du Wushu (FFWaemc ou FFWushu). Avant cela, les styles "externes" bénéficiaient de la délégation de la fédération de Karate (en gros). Depuis cette création, je n'ai pas cessé d'être le témoin de luttes de pouvoir et d'ambitions personnelles, empressées de développer chacun leur vision du Wushu et d'y apporter ce qu'ils pensent tous être le mieux pour le futur qui est à construire à partir de (presque) rien. Je veux croire à la bonne volonté originelle de chacune des parties. Mais cet effort aurait dû être organisé et planifié, collégial. Je pense que l'empressement de creuser son trou sur une terre vierge est en partie à l'origine de la situation actuelle, où, au fil des années, au moins 2 groupes dissidents ont finis par quitter la fédération pour créer leur propre fédération (FWS et FAMEOC), qui ont à leur tout fini par se rallier à d'autres fédérations déjà délégataires (resp. Karate et FullContact) faute d'avoir pu ravir le précieux sésame à la fédération de Wushu. Aujourd'hui, outre cette situation d'éclatement d'une partie de nos pratiquants sur 3 fédérations (voire plus ? sans compter les désabusés qui se fédèrent de façon neutre auprès d'organismes génériques, comme l'UFOLEP ou autres), la fédération de Wushu se trouve à nouveau divisée, en proie à des conflits de gestion interne et menacée de retrait de sa délégation ministérielle au 31 août 2014, après une première menace autour de 2009/10. Enfin, les rumeurs courent selon lesquelles le Wushu pourrait être délégué de nouveau à la fédération de Karate (FFKda)

1-PROBLEME D'ADMINISTRATION

Je ne suis pas haut placé, j'ai peu de temps disponible (en plus de mon travail, de ma famille, de mon club local, je suis aussi bénévole dans 2 autres associations) et je n'ai certainement pas tous les éléments en main. J'ai lu les documents disponibles sur le site ffwushu.fr (lettre du directeur des sports du 21 mai 2014, lettres du comité technique paritaire, synthèses en ligne des dirigeants et webmasters) ainsi que les quelques emails envoyés aux clubs de façon officieuse et non-sollicitée (mais intéressante) par des dirigeants d'autres clubs.

Tout ceci intervient dans un contexte que je vois (pour le vivre) évoluer depuis plus de 10 ans vers la professionnalisation du sport (tuant l'amateurisme, autant dans le haut niveau que dans l'encadrement du sport pour tous), l'explosion des structures sociales et publiques (pas que dans le sport !), l'individualisme grandissant (même si la prise de conscience de soi me semble être une naturelle évolution humaine, elle ne serait pas forcément contradictoire avec la vie en collectivité si seulement cet individualisme était cultivé avec des clefs autres que le consumérisme et le terrorisme, ces derniers conduisant au repli sur soi et au désengagement, tuant le mouvement associatif), le culte de l'immédiateté, la mode de la critique-spectacle, le recul de l'esprit-critique et l'attente hargneuse du messie-sauveur pour trouver des solutions-miracles à tous nos problèmes (dans tous les domaines) ... Messie aux compétences professionnelles, mais bénévole et disponible H24, suffisamment gentil pour faire ce que nous voulons de lui mais suffisamment fort pour l'imposer aux méchants qui le veulent pas ... Les clubs autour de moi ne jurent que par les retraités ; comme si le temps d'un retraité était davantage gratuit que le nôtre ...

Je déplore le manque de transparence de gestion dans beaucoup d'associations que je connais, je déplore cette critique passive qui réclame la démission (voire les lions ?), je pense que le temps est venu (car les moyens techniques et sociaux sont désormais disponibles, et des précurseurs existent déjà) d'organiser nos collectifs de façon non-hiérarchique et transparente, et donc vraiment démocratique, et surtout en étouffant les égos au profit de la pensée et de l'action collective.

rmq : les termes "président" et "trésorier" sont absents de la loi 1901, et ne sont qu'un modèle de gestion associative parmi d'autres, plus ou moins imposé par un usage centenaire et une certaine vision de la simplicité administrative (aujourd'hui obsolète) qui cherche à identifier un bouc-émissaire (pardon un "responsable") pour tout et n'importe quoi.

2-PROBLEME DE LANGAGE

Je pense qu'il est plus que temps également de rétablir un vocabulaire juste (en plus du "geste juste"). J'ai en effet pu lire avec effroi des bouts de phrase comme "Wushu = arts martiaux chinois externes", "le Qigong n'est pas du Wushu" ou "l'interne prône le non-agir" (sans oublier les habituelles guerres de tranchées entre wingchun et wingtsun, entre taichichuan et taikiken, entre sanda et sanshou, entre jeetkunedo et jiequandao, le gongfu méconnu et le kungfu galvaudé, j'en passe ...). Je ne vous ferai pas l'affront de faire un cours magistral ici, ne me considérant pas un expert de référence, mais j'aimerais quand même vous livrer quelques réflexions personnelles.

Il y a eu des dérives orthographiques et conceptuelles du fait de l'évolution de notre compréhension occidentale de la culture orientale, ou plus simplement même des systèmes de transcription des idéogrammes asiatiques en caractères latins (du Wade-Giles au PinYin ...), au fil des siècles d'exploration et de commerce. Mais si l'on mesure la vivacité et la richesse d'une langue à son évolution et son adaptation à/par ses pratiquants (nouveaux mots, nouvelles syntaxes), je pense que les dérives éthymologiques et simplifications grammaticales sont des pertes pour la pensée et la communication (la langue française en subit quotidiennement, dans les médias notamment ...). Je pense que nous ne devrions pas laisser la situation du Wushu se dégrader par l'inculture de certains (parfois haut placés) et qu'il est du devoir de nos experts de préserver cette richesse du vocabulaire d'origine (et des concepts souvent philosophiques qui y sont cachés, d'où notre "art" !!), quitte à le faire évoluer un peu, mais pas trop, à y adjoindre ce qu'il faut pour pouvoir penser et discuter des nouvelles pratiques qui émergent inévitablement, mais tout en conservant les concepts d'origine. De la même façon qu'il semble impensable de mal exécuter un taolu sous prétexte que l'on a pas compris un des mouvements ... Que l'on en crée de nouveaux, que l'on en mélange d'autres, que l'on en oublie certains (justement parce qu'on ne les a pas compris, temporairement ?), c'est la Vie. Mais le reste est perversion.

Pour un geste juste, il faut une pensée juste. Pour une pensée juste, il faut un vocabulaire juste.

3-PROBLEME DE PENSEE

Il y a cette manie occidentale de tout vouloir découper, catégoriser, pour mieux comprendre ... C'est un peu comme la vulgarisation scientifique, c'est nécessaire, car cela permet de rendre accessible au plus grand nombre certaines notions complexes. Mais les experts se doivent de ne pas laisser se répandre des concepts inexacts, incomplets. Les arts martiaux doivent nécessairement être complets (l'art + le martial + l'énergie de liaison entre les deux !) ; qu'ils soient chinois ou autres ne change rien :
- un pratiquant d'un style "externe" aborde nécessairement (même à son insu, à plus ou moins faible dose) de l'interne et de l'énergétique, même s'il n'est qu'un compétiteur sportif (un meilleur "qi" favorisera la gestion de l'effort ou l'efficacité des techniques), à plus forte raison s'il prétend pratiquer l'art martial (qui est Un) ;
- un pratiquant d'un style "énergétique" peut effectivement se limiter à cela et évidemment le creuser bien davantage que le premier qui ne peut pas tout creuser (il faut bien partager son temps et faire des choix), mais il va nécessairement le creuser dans diverses directions : énergétique martiale (rapprochement avec les styles externes), énergétique santé (rapprochement avec les médecines douces), énergétique du mouvement (rapprochement avec les danses ou les gyms douces, et les styles "internes"), etc. ;
- de même que le pratiquant d'externe peut creuser vers la technique appliquée (self defense, combat), la technique théorique (taolu traditionnel), le gymnique ("body training" et autres nouveautés) voire l'acrobatique (taolu moderne).

Cet "art du mouvement" est d'ailleurs une réalité : le Bagua me semble d'ailleurs être à l'origine essentiellement cela (un art du mouvement et du déplacement), des synthèses modernes intéressantes apparaissent qu'il faudra tôt ou tard prendre en compte (cf. le "Systema syncrétique", au nom malencontreusement dissonnant mais qui semble très sérieux, réfléchi et prétend se baser en partie sur du Qigong ; sans parler du "Tricking" ou du "Parkour" ou du "Natural moving", qui semblent hors sujet ici, mais restent à plus d'un titre intéressants et innovants, au delà de leurs apparences d'activité "de rue").

3.1-Qu'est-ce qui nous rassemble, ou le devrait ?

Il me semble que c'est une culture, qui n'est pas forcément notre culture native, mais à laquelle nous avons envie d'adhérer. Une culture, avec ses codes, son vocabulaire, son histoire et son actualité. Sa diversité surtout ! Nous sommes plus nombreux que nous le croyons, et pourtant très différents les uns des autres. Nos motivations et nos objectifs sont propres à chacun. Les directions de nos voies martiales très diverses, et pourtant toutes aussi "justes" puisque unies dans un tout. Certains ont les moyens de creuser dans plusieurs directions et accumulent un savoir qu'ils se doivent de transmettre. Ils ont besoin d'un "cadre" pour cela. D'autres ne creusent que dans une direction à la fois, humblement, et ont tout autant le droit de transmettre. La majorité ne fait que participer à un élan, parfois aux apparences consuméristes, mais sans eux, les experts ne serviraient à rien et ne seraient rien : la diffusion culturelle a nécessairement un moteur, les encadrants, et un vecteur, les pratiquants ; et ils ont leurs droits aussi, que ce "cadre" doit garantir. Appelons ce "cadre" une fédération.

Comment concevoir alors plusieurs fédérations, chacune garante d'une fraction de culture ? Voire quel serait le sens de mélanges avec une autre fédération de culture différente ?

Les arts martiaux chinois SONT le Wushu. Les arts martiaux chinois sont Un et à la fois Multiples. Le Wushu est yin (interne) et yang (externe), le qi nous unit. L'externe, par exemple, est lui-même yin (théorique) et yang (appliqué). Etc. L'interne, comme l'externe, possède chacun son Da, son Ti, son Na et son Shuai. A l'image des 5 piliers physiques et des 5 piliers psychiques qui constituent chacun de nous. Même si l'on n'en creuse qu'un à la fois, chacun est fait de tout (dans diverses proportions) et reste partie d'un tout.

3.2-Qu'est-ce qui nous divise, et ne le devrait pas ?!

D'abord les égos, c'est bien connu (diviser pour mieux régner).

Ensuite, l'incompréhension et les lacunes.
* Un exemple. Le "non-agir" (Wuwei) n'existe pas. Wuwei est inertie, et l'immobilisme c'est la Mort (et donc cela cesse d'exister). C'est le Wei-wuwei (agir sans action, vaincre sans le sabre ...) qui est existe. Wei-wuwei est souple (le Roseau !) et mobile, et la Vie est dans le mouvement. Mais le mouvement n'est pas fatalement agressif. Eviter l'agressivité, sans se laisser faire, c'est ça la direction du Wei-wuwei. Or c'est pour l'instant surtout de l'agressivité que j'ai lue dans certains emails ou certaines lettres (surtout celles qui prétendent donner des leçons sur le "Wuwei" ...), de l'agressivité encore que j'ai beaucoup entendue dans les AG de 2007/08 (avant les premiers schismes ; je n'y suis d'ailleurs plus retourné depuis ...). Indigne de nos experts !
* Autre exemple. Le mot Wushu ne devrait pas être assimilé aux seuls arts externes, voire pire à la seule pratique compétitive moderne (essentiellement taolu interne et externe, et sanda). Même s'il y a évidemment un enjeu concernant l'entrée aux J.O. de notre discipline sous cette seule forme moderne, pourquoi serions nous moins solidaires entre nous (Wushu moderne et Wushu traditionnel) que ne le sont le Judo et le Jujutsu par exemple, ou le Volley-Ball et le Beach-Volley, etc. ?!...

Enfin, la diversité même de nos pratiques, et de nos motivations. Une seule branche unique englobant tout n'a pas de sens, c'est déjà le rôle de la fédération. Trois branches découpées selon l'habituel Nei-Wai-Qi (interne-externe-énergétique) n'a pas plus de sens qu'un découpage par exemple selon le Da-Ti-Na-Shuai (frappe-coup-saisie-projection) ou selon les origines taoistes (Wudang) ou bouddhistes (Shaolin) : aucun style n'est mutuellement exclusif et de plus en plus de pratiquants cherchent à toucher un peu à tout, leur cadre d'évolution doit leur permettre d'évoluer librement. Découper, cloisonner, ne peut que mettre des contraintes sur les épaules de ceux qui pratiquent (qui bougent et qui vivent) et ne peut que servir les intentions de quelques uns qui ne souhaitent que règner (immobiles et nous menant TOUS, pas seulement eux, à la Mort ...).

3.3-Quelle solution alors ?

L'analyse des résultats du référendum du 02 février 2014, publiés sur le site ffwushu.fr, me semble fournir quelques pistes intéressantes.

Pourtant, je n'adhère pas du tout aux analyses point par point, pointant du doigt une dichotomie systématique des styles externes (AMCX), attribuée à une origine "fédé Karate" et une vieille culture des "grades" ...

Et si l'explication était seulement que davantage d'AMCX cultivent en fait les 3 branches alors que les AMCI et AEC ont davantage tendance à ne creuser que leur propre branche ? Peut être même y a-t-il un biais statistique dès le départ : ceux qui pratiquent les 3 branches n'auraient-ils pas davantage tendance à être licenciés sous l'étiquette AMCX (puisqu'on ne peut en choisir qu'une) ? Ceci expliquerait alors facilement pourquoi les AMCX ont majoritairement davantage cette vision "unibranche" que les AMCI ou AEC.

Cependant, les conclusions sont sans appel : rester unis en une seule fédération !

Et ensuite on lit qu'il "semble nécessaire de donner plus d'autonomie au Wushu moderne/sportif", puisqu'en effet, même si une majorité de pratiquants s'était prononcée en faveur d'une seule fédération, l'option d'une fédération sportive en parallèle d'une fédération traditionnelle arrivait en seconde position.

Voilà donc une solution de découpage par branches de la fédération : une branche moderne/sportive et une branche traditionnelle !

4-PROBLEME DE GESTE ...

D'ailleurs, la même dichotomie existe (ou devrait exister ?!) au niveau des grades : ATT et DUAN.

Mais là encore, beaucoup de confusions. J'avais compris au départ que 2 concepts étaient nécessaires : d'une part l'évaluation d'un niveau technique pour accéder aux formations et statuts d'encadrants ; d'autre part l'évaluation d'un niveau technique pour accéder aux compétitions. Naïvement, j'avais pensé que cela correspondait respectivement aux ATT et aux DUANS. Sauf que par exemple, le programme des DUANS comporte une épreuve "explication martiale" que ne contient pas le programme des ATT : bizarre ?! Autre problème : le découpage récent des DUANS en 2 voies "moderne" et "traditionnelle", cette dernière devenant donc concurrente de l'ATT ?!

A présent, on parle de supprimer les ATT, harmoniser les grades entre branches, etc. Je suis désolé, je vais encore poser des questions naïves. Quelle est la valeur d'un grade ? Quelle comparaison est possible entre un grade acquis par le travail traditionnel et la réflexion sur sa pratique, celui acquis par l'entraînement intensif de compétition, et celui acquis de façon honorifique par un engagement fédéral ? La qualification d'un jeune compétiteur de niveau international de 20 ans (physique), ne sera pas la même que celle d'un DTN fédéral de 40 ans (administratif, politique, éthique) ou celle d'un vieux sifu de 60 ans (philosophique, moral) ; pour autant les 3 auront (ou devraient avoir) en commun la même "technique". Le Wushu les rassembleront, mais pourtant leurs "6ème duan" (par exemple) seront différents.

Cela conforte donc la vision :
- d'une branche traditionnelle du Wushu, centrée sur la vie des clubs et le sport pour tous et le sport santé, une branche "intérieure" qui contient nécessairement les 3 "voies" (énergétique, interne, externe), avec l'acceptation des différences de pratiques, en fonction de l'âge et de l'objectif (de la santé au self defense en passant par le pur loisir désintéressé) ;
- et d'une branche moderne du Wushu, centrée sur la compétition et le haut-niveau et la vitrine "extérieure", qui elle aussi contient nécessairement les 3 "voies", mais avec une vision et des objectifs différents.

Chaque branche pourrait alors développer (ou pas !) son système de grade, en fonction des besoins (ou pas !) de ses pratiquants et du besoin (ou pas !) d'harmonisation internationale.

La jonction entre les 2 branches se faisant naturellement par les encadrants.

5-PROBLEME DE DELEGATION

Encore faudrait-il avoir les moyens de former correctement nos encadrants !

A mon avis, le vrai messie qu'il nous faut dans cette histoire, c'est un ministère des sports qui prendrait enfin ses responsabilités et assurerait lui-même sa mission de service public en organisant et finançant directement la formation et la gestion des ressources humaines encadrantes (au moins le fameux "tronc commun" sportif national !), au lieu de nous orienter sur de fausses voies avec ces menaces de transfert de délégation (mais quelle autre fédération "présenterait toutes les conditions et garanties nécessaires pour assumer cette nouvelle responsabilité" ???!!!...) qui nous divisent (pour mieux régner ?) ... Un peu comme si le ministère de l'enseignement "déléguait" l'éducation nationale à des fédérations ou associations voire entreprises de droit privé ... Comment ? Ah bon, c'est déjà en train de se faire ?!... Non, ne riez pas ...

6-CONCLUSION

Sauf qu'au final, les ministères c'est le gouvernement, et le gouvernement c'est nous ! Les défaillances de nos élus ne sont que le reflet de nos propres défaillances.

Arrêtons de nous diviser à cause de guerres de califes, d'ambitions personnelles, etc.

Parlons enfin le même langage (et (re)définissons-le si besoin ?!).

Acceptons l'idée que nous pratiquons tous la même chose mais de façon différente.

Soyons réalistes et honnêtes sur nos pratiques : danger du culte des égos qui risque de faire oublier qu'un résultat en compétition ne représente rien d'autre qu'un résultat sportif (même si c'est déjà énorme en soi) et ne se compare pas à une pratique traditionnelle ; danger des dérives économiques avec un effet "pareto" où 80% des ressources ne seraient investies que dans les 20% d'activités les plus "visibles", et donc la vitrine sportive de quelques uns au détriment du sport pour tous ; etc.

Faisons de notre fédération bien davantage qu'une agence d'assurance (n'importe quelle fédération multisport généraliste peut le proposer aussi ; nos assurances personnelles couvrent d'ailleurs déjà parfois pas mal d'activités !), ou de formation professionnelle (qui relève d'un service public), ou d'inscription voire sélection à des compétitions (qui serait oublier 80% de nos pratiques) ...

Toutes les facettes du Wushu sont complémentaires et ne forment qu'une seule culture commune. Nous sommes un tout fait de parties distinctes ; on ne peut se passer les uns des autres sans s'amputer d'une partie de nous. Relançons les rencontres, les synergies, les animations, les échanges, etc., et sachons faire circuler le Qi (les ressources générées par la vitrine ...) afin de maintenir le souffle dans l'ensemble de notre organisme (fédéral).

Salutations wushu,

Philippe Marty

Orsay, les 01 et 09 juin 2014

Addendum, le 02 septembre 2014 : l'été est passé, les AG aussi, les deux récents (qqs jours) emails récapitulatifs de la FFW sont clairs : la fédé garde son agrément (depuis 1998) pour les arts énergétiques et martiaux chinois mais le "Wushu" (comprenez les compétiteurs et les ambitions pour l'olympisme) sont en effet délégués à la FFKda ; bref la FFWushu est morte, vive la FFWaemc ... les signatures des emails fédéraux sont suffisamment ostensibles ... mais en fait on prend les mêmes et on recommence, la modernité en moins, et toujours personne pour entendre, ni comprendre, que Wushu et AEMC ne sont qu'une seule et même chose, que ce n'est qu'une question d'état d'esprit ou de point de vue, comme le Yin et le Yang ... le "Wushu sportif / compétitif" est bien plus ancien que les ambitions olympiques, les soit-disantes origines remontant au renouveau économico-culturel de la Chine des sixties, ou même que la guerre des Boxers ... la confrontation pour l'ego est aussi ancestrale que la confrontation pour la vie ! séparer les deux, enseigner l'un sans expérimenter l'autre, c'est comme séparer son poing droit de sa paume gauche, ou encore la science sans la conscience ! car l'être humain se construit en apprenant à cheminer (la Voie !) entre ces deux facettes, ces deux pôles (aucune n'étant ni la "bonne" ni la "mauvaise" ni "meilleure" que l'autre, elles ne sont qu'un ensemble dynamique pour l'humain, comme la montagne et la vallée le sont pour l'eau). Mais pour apprendre (à cheminer), enseigner et expérimenter, il faut une "école" ... Et si on pourrait à la rigueur justifier de deux "écoles" "parallèles" (que ce soit deux branches au sein d'une même fédé ou deux fédérations spécialisées mais partenaires et solidaires), comment imaginer d'installer une fraction d'école de notre culture au sein d'une école complète de la culture voisine ? Quel en est le sens, le "vrai sens", au sens de l'éthique, de la raison ou de la seule durabilité ? Car tôt ou tard, dans l'école traditionnelle finira par (re)naître ce besoin de "confrontation". C'est inévitable. C'est ancestral. Et alors les compétitions de l'école traditionnelle seront de nouveau en concurrence avec les compétitions de l'autre fédération ... Et chacun se prétendra légitime. Et on parlera de nouveau de refusionner ensemble et bis repetita placent ... Combien de fois encore ? Car c'est exactement déjà ça qu'il s'est produit. Combien de temps et d'énergie allons nous encore et encore gaspiller dans cette imposture, ce faux cycle qui parasite les vrais cycles harmonieux, par asservissement aveugle à ceux qui nous divisent et feignent de nous refusionner de temps en temps ?... Et encore, si cela n'avait lieu qu'au niveau des fédérations d'arts martiaux ... Mais ouvrons les yeux bon sang ! Réveillons-nous ! Indignons-nous certes, mais AGISSONS SURTOUT ! VITE !!!...

Remarque : un de mes correspondants s'est posé la question de la vanité potentielle d'une "fédération de tous les arts chinois" en comparant avec la relative réussite DES fédérations d'arts japonais (Judo, Karate, Aikido ...). Peut être devrions nous faire DES fédérations pour chaque art chinois ? Et bien, non, je ne le crois pas. D'abord la réussite de ces fédérations d'arts japonais n'est que "relative" en effet ... Celle de Karate fédère aussi tout un ensemble d'arts orientaux non-japonais et n'a pas une unité de culture, autre que peut être celle du "combat sportif" ... qu'elle se dispute avec celle de Judo, la première en "chronologie" et en "masse" ... au point de sacrifier sa culture, et les autres, sur l'autel du Mont Olympe ! Quant à l'Aikido, c'est aussi au moins deux fédérations distinctes qui rivalisent depuis des décennies pour la reconnaissance nationale de leur art ... Querelles de maîtres et d'héritiers ... Ou alors peut être faut-il limiter le concept de fédération aux seules pratiques sportives et s'en affranchir complètement pour les pratiques traditionnelles ? Je ne le crois pas non plus, déjà pour la raison invoquée précédemment (sportif et traditionnel ne peuvent pas vivre longtemps séparément ...), et d'autre part parce l'être humain possède un autre moteur, une autre dynamique bipolaire : le groupe et l'individu. Une fédération est un organe informatif et identitaire nécessaire au développement de toute pratique individuelle. On finit toujours par se regrouper, par affinité ou similitude, par intérêt économique ou politique, ou juste parce que le chemin parait moins long en compagnie d'un ami ... Même les "anti-fédé" finissent toujours par se fédérer entre eux. Et même s'ils prétendent que la différence est leur dimension plus modeste, plus à échelle humaine, leurs groupements ne font que grossir, ou quand ils disparaissent c'est pour être absorbés par plus gros encore. Ce n'est pas une question d'échelle, mais une question de temps. Il faut seulement prendre le temps de bien faire, même si c'est pour grossir moins vite, car pas d'inquiétude, on ne peut que grossir de toutes façons ...

Addendum, le 26 novembre 2014 : aujourd'hui j'apprends que la FFWaemc (le W pour WUSHU et le aemc pour expliquer aux gens que wushu=arts énergétiques et martiaux chinois) est devenue Faemc ...
Nous avons "perdu" le 2ème F (car nous sommes toujours agréée mais plus délégataire et donc plus "Française" ...) mais nous avons perdu le W aussi (car le wushu MODERNE (= de compétition) est passé sous délégation de la fédération de ... Karate !).
Nous venons donc de regresser de 40ans, et tous les efforts de Bruce Lee pour faire comprendre que le kungfu (wushu) n'est PAS du karate viennent d'être balayés stupidement.
Quant à faire comprendre que le wushu ne se réduit pas à la seule compétition moderne, c'est encore pire.
Nos dirigeants ne savent plus PARLER (ils ne maitrisent pas leur vocabulaire) ; cela témoigne de leur capacité à PENSER ...
PUTAING (avec l'accent de Toulouse), mais relisez ma lettre, merdeu kwâ !
Alors, certes, une FFW était ambitieuse, car après tout il n'existe pas de FFBudo mais plutôt des fédés de judo, karate, aikido ... mais à la différence des Budo japonais qui se battent pour la reconnaissance de multiples maitres fondateurs, le wushu est unifié par un même esprit, même avec plus de 400 styles différents et d'autant plus de maitres fondateurs ou héritiers (voire stars du cinéma) ; cette ambition me semble possible si seulement nos dirigeants étaient animés de ce même esprit !